![]() "SEXE, IDEOLOGIE, ISLAM"
Fatima Mernissi
Tierce
1983 Paris
Voici, en quelques notes de lecture, une approche de l'ouvrage le plus brillant de Fatima Mernissi, universitaire marocaine. Ce premier ouvrage ouvrira la voie à bien d'autres, qui contribuent à mieux cerner la condition féminine en islam, et la place que ce système de pensée consent à lui accorder.
Bernard Antoine Rouffaer
Pour la bibliographie de l'auteur :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Fatima_Mernissi
Notes de lecture :
Pages 5-6-7 : De l'utilité de l'agressivité et de la concupiscence pour le service de l'islam.
Page 9 : Des deux manières de régler l'instinct sexuel selon les divers types de civilisation.
Pages 21-22 : Sexualité féminine selon Freud.
Pages 24-25 : Masochisme féminin pour Freud, passivité masculine pour l'islam.
Pages 26-27 : Agressivité sexuelle féminine (Maroc).
Pages 28-29 : Occident : âme/chair, la sexualité étant dévalorisée.
Orient : masculin/féminin, la féminité étant dévalorisée.
Pages 30-31 : « …l'humanité n'est faite que de mâles… »
Hijra et Jahiliya.
Pages 32-33 : « La sexualité de l'homme [musulman] est caractérisée par la promiscuité (polygamie) et le laxisme (répudiation). »
Pages 34-35 : La répudiation islamique.
Pages 36-37 : « Cet aspect frivole… »
Pages 38-39 : « L'expérience vécue par le Prophète face à l'auto-détermination des femmes… »
Pages 40 à 43 : Mahomet répudié par ses femmes.
Pages 46 à 49 : L'épisode de Zaïnab et l'action de Dieu.
Pages 50-51 : Mahomet fauteur de guerre civile : « Tu les as tous tués toi-même à Badr »
Page 52 : « La loi musulmane accorde au mari dont l'épouse refuse les avances [sexuelles]le droit de lui retirer la nafaqa (sa subsistance qui inclut nourriture, vêtements et logements) qu'il est normalement de son devoir de lui assurer »
Pages 54 à 57 : « Survivance de pratiques qui rappellent l'auto-détermination des femmes dans la sexualité pré-islamique »
Page 59 : « La nouvelle structure familiale, qui a constitué une révolution dans les mœurs de l'Arabie pré-islamique, avait pour objectif d'instaurer la suprématie masculine et de protéger les intérêts du patriarcat. La polygamie, la répudiation, l'interdiction de commettre zina (qui concerne surtout les femmes, puisque les hommes avaient droit à plusieurs partenaires légitimes) et les garanties de paternité sont autant d'institutions qui ont contribué à favoriser
transition entre l'ancienne et la nouvelle structure…[sociale]. »
Pages 60 à 69 : « Sexualité et unions durant la période pré-islamique »
(Pas de polygamie en Arabie avant l'islam ?)
« Le Prophète avait conscience, semble t'il, que le fait de partager un mari pouvait avoir quelque chose de néfaste pour une femme. »
« Amina [l'une des femmes du Prophète] reconnaissait que les femmes étaient plus heureuses avant l'époque du Prophète. »
Pages 70-71 : « La résistance des femmes à l'Islam »
Pages 72-73 : « Les tendances matrilinéaires dans la société pré-islamique. »
Pages 74-75 : « Le mariage sadica se caractérisait par la liberté sexuelle des femmes… »
Pages 76-77 : Quatre types de mariage, en plus du mariage Mut'a.
Pages 78-79 : « Les effets du mariage musulman sur la société pré-islamique. »
Pages 80-81 : « Le fait que la polygamie ait été érigée en institution par le Coran après le désastre d'Uhud… »
Pages 82-83 : « Dans l'intérêt du prestige militaire de l'Umma, il était essentiel, étant donné les conditions propres à l'Arabie, qu'aucun musulman ne demeurât invengé. »
Pages 84-85 : « La idda implique que le Dieu musulman ne compte pas sur la coopération des femmes, … »
Pages 86-87 : Transfert de capital symbolique.
Page 88 : Ancienne et nouvelle Jahiliya. [= incroyance, non-islamité, barbarie]
Page 101 à 103 : Ségrégation sexuelle territoriale.
Pages 105 et 106 : « En raison précisément des restrictions imposées sur les rencontres hétérosexuelles, le marocain vivant dans les régions où elles sont imposées est conditionné de façon à percevoir les femmes uniquement en terme de besoin sexuel. Aussi bien dans le mariage qu'en dehors, la femme n'est qu'une occasion, plus convenable que des animaux ou d'autres hommes, de satisfaire ses besoins sexuels. »
Page 112-113 : « …une jeune fille ne peut se donner elle-même en mariage mais doit être donnée par son wali (gardien). »
Pages 118-119 : Opinion de Ghazzali [grand théologien musulman du moyen-âge] sur les hommes amoureux.
Pages 120-121 : « …son droit [de mari] de la corriger [sa femme] en la battant. »
Page 123 : « Imam Ghazzali convient que le mariage est l'équivalent de l'esclavage pour une femme parce qu'elle se trouve dans l'obligation « d'obéir à son mari sans limite aucune, sauf dans le cas où ce qu'il lui demande constitue une violation flagrante des ordres d'Allah » [de al-Ghazzali, « Revivification », page 56] » « L'acte sexuel, considéré comme polluant, … (Coran, IV :43) »
Pages 124-125 : « Afin d'empêcher une fusion complète avec la femme… »
« La cellule conjugale présente un danger plus grave que l'étreinte sexuelle… »
Pages 126-127 : « « La cellule conjugale représente un réel danger [pour l'emprise idéologique de l'islam]; en conséquence elle affaiblit par deux disposition légales : la polygamie et la répudiation. »
Pages 128-129 : « statistiquement la polygamie se meurt, mais ses prémisses sont encore en opération, même dans des foyers monogames, … »
Pages 130-131 : « L'aspect le plus frappant dans le divorce marocain est le fait que le caprice du mari de rompre le lien matrimonial n'est jamais remis en cause. » (1983)
Pages 134-135 : Versets coraniques ordonnant l'amour des parents.
Page 143 : « Les premières années de mariage, la jeune épouse perçoit sa vie comme une succession de grossesses et, plus tard, elle se rappelle cette période comme ayant été entièrement consacrée à ses enfants et à leurs problèmes : … »
Pages 144-145 : « …facteurs caractéristiques de la structure du pouvoir dans les institutions totalitaires, … »
Pages 150-151 : « Bida'a »
« ..nous allons assister à une tentative névrotique d'ossifier les superstructures, … »
Pages 153 : « Dans le monde musulman, la sexualité est territoriale : … »
« Tel est le cas lorsque la femme est obligée de traverser la rue, espace public et donc masculin par définition. »
Pages 156-157 : Tableau : « Identité des membres dans chacun des univers sociaux »
Pages 158-159 : « …un ensemble de mécanismes est mis en jeu pour empêcher qu'une intimité trop grande ne s'établisse entre les partenaires. » (et d'autres)
Pages 160-161 : « …la ségrégation est une façon de protéger l'homme, passif, incapable de se contrôler… » de contrôler ses instincts sexuels.
Pages 162-163 : « Le voile signifie que la femme est présente dans le monde des hommes mais qu'elle est invisible, puisqu'elle n'a aucun droit d'être dans la rue. »
« …il présume que toute femme qui se promène dans la rue est sexuellement disponible. »
Note : place de la femme dans la mosquée.
Pages 164-165 : « …le simple fait qu'elles se trouve là où elle ne devrait pas constitue un acte d'agression. » contre l'ordre social et idéologique.
Page 166 : Frantz Fanon, le FLN. et les femmes.
Page 173 : « Un homme respectable n'est pas simplement un homme qui maîtrise une certaine puissance économique, c'est aussi une homme qui maîtrise le comportement sexuel de sa femme, de ses filles, de ses sœurs. »
« nous serions plus heureux, et plus puissants économiquement, si l'honneur et le prestige d'un homme n'étaient plus liés à sa capacité de contrôler ses femmes en les gavant de poulets et de perles, mais à sa capacité de maîtriser l'énergie solaire ou l'électronique. »
Page 177 : « Un homme dont l'épouse se promène librement dans la rue est un homme dont la virilité est en danger. »
Pages 178-179 : Cette idée de la France [socialement] modernisante est un fantasme colonial… »
Pages 188-189 : « Les fonctions de la répression sexuelle en période de crise économique. »
Pages 190-191 : « L'homme génitalement satisfait est honnête, conscient de son devoir, courageux, discipliné… » (W.Reich)
Pages 192-193 : Frustration sexuelle, répression politique = violence domestique.
Pages 194-195 : « L'ordre moral … considère que les hommes et les femmes sont antagonistes… »
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![]() "LA FEMME DANS L'INCONSCIENT MUSULMAN"
Fatna Aït Sabbah
Editions Albin Michel
Paris 1986
Il s'agit en fait de la vision de la Femme que peuvent avoir les imams, ulamas et autres docteurs de l'islam. La première est la vision érotique, la seconde la vision légale, ce au sens du droit islamique. Ainsi que le fait remarquer l'auteur, l'une et l'autre n'ont aucun rapport avec la réalité... C'est néanmoins de telles fables qui vont servir de fondement à la pensée islamique, à la pensée des juristes et théologiens musulmans sur la Femme et sa place dans la société.
La vision érotique de la Femme fait d'elle, dans sa version la plus accomplie, un être omnisexuel, essentiellement préoccupé par la recherche de l'orgasme (page 73). Quitte à obtenir cet orgasme de l'accouplement avec un animal, âne ou ours (pages 60 à 67). L'âne, surtout, impressionne le mâle oriental:
"Chaque fois qu'il se met en situation de compétition avec l'âne, l'homme perd la partie. Sa supériorité sexuelle est profondément ancrée dans les croyances." (page 65)
L'Africain, le Noir constitue aussi une menace pour l'ordre social islamique. La taille supposée de son pénis l'expose à la concupiscence féminine. Il en vient à copuler avec l'épouse ou la fille de son maître musulman, lequel le châtie. "Dans le discours merveilleux, les châtiments de l'esclave noir qui copule avec la fille ou la femme du maître sont systématiques et brutaux." (page 82)
"Il semble qu'il y ait un véritable pacte de subversion de l'ordre musulman, de ses hiérarchies et la destruction de ses institutions entre l'omnisexuelle et les hommes de basse condition, notamment les esclaves qui sont invariablement dans ces cas-là noirs!" (pages 79-80) Et quoi de plus normal dans une société immémorialement esclavagiste et machiste, comme l'est la société arabe, puis arabo-musulmane...
Face à cette puissance de destruction, le légiste musulman s'est dressé pour protéger la société organisée par son Prophète. D'abord en affirmant l'inégalité des sexes, la Femme étant l'être inférieur (page 157). Puis en introduisant un troisième partenaire dans l'intimité sexuelle du couple: Allah (page 191). Enfin en proclamant que la stérilité est une conséquence directe de l'incroyance en l'existence et la puissance du dieu de Mahomet (page 180).
Le chapitre intitulé "Le paradis, le croyant et la houri" est spécialement intéressant. Après avoir constaté l'absence d'équivalent masculin de la houri [une sorte de concubine ou de domestique, promise au croyant mâle], et donc l'inégalité de traitement réservé aux bonnes musulmanes admises au paradis, l'auteur donne cette redoutable définition du paradis islamique: "Le croyant est passif, il digère, fait l'amour avec une houri privée d'utérus (ne pouvant enfanter), et il se repose. Comme la houri, il s'intègre dans le système en tant que chose privée de volonté. La seule différence est que la houri est consommée en tant qu'objet par le croyant et que celui-ci est consommé en tant qu'objet par le système." (page 172)
L'essentiel de la pensée occidentale, au cours des siècles, a visé au développement des capacités et du libre-arbitre de l'être humain. On voit là les difficultés qu'il y a à accommoder la pensée islamique avec son homologue et rivale d'Occident.
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TABLE DES MATIÈRES
Avant-propos 9
L'islam amoureux: discours mystique, courtois et
merveilleux 13
Le discours soufi sur l'amour 17
La littérature religieuse courtoise 21
La poésie amoureuse 24
Le discours merveilleux 26
La place de la femme dans l'islam contemporain 31
Le discours érotique religieux 45
La femme omnisexuelle: animale et insatiable 53
Rebelle, subversive et riche 69
L'homme-phallus et ses angoisses 91
Le discours orthodoxe 119
Le discours et le pouvoir 121
Dieu, l'homme et la femme 131
Maître et esclave 146
Le Paradis, le croyant et la houri 163
La femme castrée 173
Lutte contre le désir: le grand jihad 197
Conclusion 217
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Bernard Antoine Rouffaer 11.2.2016
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![]() « LES FRERES MUSULMANS, ENQUETE SUR LA DERNIERE IDEOLOGIE TOTALITAIRE »
Michaël Prazan
Grasset Paris 2014
Les “Frères musulmans” (Association des Frères musulmans”), créés par Hassan el-Banna en Egypte, en 1928, aiment la pénombre. Ils oeuvrent depuis plus d'un demi-siècle, sans grands bruits, en souplesse, hantant les universités, les hôpitaux et les prétoires pour propager leur vision du monde. Révolutionnaires bourgeois, ils pénètrent les systèmes plutôt qu'ils ne les combattent. C'est à une plongée dans ce monde si particulier, peuplé d'hommes bien élevés, moralisateurs, influents, patients et déterminés qu'à effectué Michaël Prazan. Loin des appels au meurtre ou des atrocités publiques de certains groupes armés, dans le calme des bureaux et des dispensaires, il nous dévoile l'une des matrices de la vague islamiste actuelle.
Bernard Antoine Rouffaer 20.3.2015
Quelques éléments intéressants:
Page 50: Le programme des Frères musulmans, édité en 1936: 50 réformes “...qui devront s'appliquer à tous les aspects de la vie.”
Page 58: Jusqu'à l'année 1948, “...l'appareil secret [de la Confrérie] multiplie en Egypte les attentats contre les représentants de l'Etat...”
Page 71: La priorité de Nasser, jeune officier: la lutte contre le colonialisme, non la construction d'un “citoyen musulman”, but des Frères. En 1949, Nasser quitte la Confrérie et fonde les “Officiers libres”, emmenant avec lui 130 des 150 officiers de l'armée égyptienne ralliés aux Frères musulmans.
Page 80-81: Nasser contre les Frères musulmans égyptiens.
Page 89: “...j'ai partout rencontré le nom de Sayyid Qutb.” Un nom “évocateur”, “puissant”.
Pages 92-93-94: Où Qutb hait l'Amérique après l'avoir visité.
Page 130: Le premier groupe armé des Frères en Palestine, contre les Britanniques et les juifs, celui de Ezzedine al-Qassem (1931-1935).
Page 135: Gaza: les maisons des riches propriétaires de tunnels vers l'Egypte.
Page 173: Camp David: rupture entre les Frères musulmans égyptiens et Sadate.
Page 224-5: Les USA aidant les Frères: l'exemple de la mosquée de Munich dans les années 50.
Page 254: Plusieurs formes de salafisme, les jihadistes, les quiétistes, mais tous adhèrent “à la pensée de Sayyid Qutb”.
Page 262-3: La zabiha, petite marque au front des dévots: stigmate réel ou supercherie?
Page 269-70-71: L'oeuvre caritative des Frères. Leur triple identité: politique, religieuse, caritative.
Page 272: Les Frères musulmans, un mouvement diffus, composé de membres et de sympathisants. Rien de semblable à ce qu'était, en son temps, l'Internationale communiste.
Page 292: Roger Garaudy, penseur français rallié à l'islam: une aventure sentimentale ou intellectuelle?
Page 311: L'avenir de la Terre Sainte selon les Frères: il y aura toujours des musulmans, des chrétiens et des juifs, mais... ”Mais nous serons souverains et nous dominerons”.
Page 323: Après la révolution en Egypte, “...avant même l'élection de Mohamed Morsi...”, le gouvernement des USA entamait des pourparlers avec les Frères avec pour but d'obtenir “...des garanties sur les accords de paix israélo-égyptiens...”.
Page 355: Tunisie, après la révolution contre Ben Ali, exemple de pénétration des Frères dans les universités du pays: “le calvaire du doyen de la Manouba”, coups, action en justice.
Page 365: Tunisie, condition féminine après la révolution: “...rien d'acquit...”
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![]() « Les religions meurtrières »
Elie Barnavi
Flammarion
Paris 2006
« 9 thèses sur la religion politique .» Une analyse de l'impacte du fondamentalisme religieux sur les États et les modes de pensée de l'homme occidentale. En Europe, mais aussi en Israël. Barnavi observe d'un œil critique le décalage existant entre le monde intellectuel de l'Occidental moyen, façonné par des décennies de prospérité bourgeoise et de relativisme culturel, et la nature des défis politiques et culturels auquel il est désormais confronté...
par Bernard Antoine Rouffaer
Quelques éléments intéressants :
Page 14 : « Façonné par des siècles de rationalisme triomphant, amolli par une civilisation du bien-être où l'individu est tout et la collectivité n'est plus grand-chose, habitué par une paresse intellectuelle érigée en système à ignorer ce qui gêne vos certitude jusqu'à oublier les racines de votre propre civilisation, comment affronteriez-vous un phénomène auquel rien ne vous a préparé ? »
Page 19 : « C'est enfin [la religion] un système symbolique pourvoyeur de sens, d'espoir, de valeur, et d'identité, et c'est précisément pour cela que la religion produit autant de violence : ces choses-là sont assez importantes pour qu'elle vaillent la peine de tuer ou de se faire tuer pour elles. »
Page 22 : « Dans le confort intellectuel et moral dans lequel vous étiez installé, il vous suffisait de savoir que les hommes cultivaient des manières différentes d'adorer leurs divinités et de considérer ces différences avec la bienveillance tolérante que vous ont fabriquée des siècles de relativisme culturel. »
Page 27 : « La place de l'individu apparaît ainsi non comme la résultante de forces sociales et politiques qui reflète l'avantage moralement discutable des puissants du jour ; elle illustre un projet divin qui fonde l'équilibre de l'univers. »
Page 30 : Substitut à la religion en Occident.
Page 36 : « Le fondamentalisme est une pente savonneuse. Rien n'est plus capiteux que la quête des origines, et la pureté qui est censée s'y trouver. »
Page 36-37 : Scissiparité.
Page 40-41 : Différences en Saoud et Ben Laden ?
Page 46 : Calvinisme et apartheid.
Page 50 : La religion n'est pas, comme pour le bouddhisme, un moyen d'échapper à la condition humaine, ou, comme pour les Grecs et les romains, un élément de la machinerie sociale. Juifs, chrétiens et musulmans pensent autrement.
Page 53 : Orthodoxie (bonne pensée) et orthopraxie (bonne pratique), ce qui différence le christianisme, d'un côté, le judaïsme et l'islam de l'autre.
Page 59 : Machiavel.
Page 62 : Comme le Romain, distinguer la religion dans l’État. Préalable à la séparation de la religion et de l’État moderne.
Page 68-69 : Horreur des rabbi devant le sionisme.
Page 70-71 : Émergence, après 1967, d'un nouveau sionisme, à forte teinture religieuse, différent du sionisme socialisant des origines de l’État juif.
Page 72-73 : Laïcs et religieux en Israël.
Page 76-77 : Faiblesse et force de l’État en Israël..
Page 80 : « Confusément, vous avez senti que les explications d'ordre rationnel dont nous avons l'habitude en Occident n'étaient peut-être pas suffisantes pour rendre compte du phénomène [de l'islam radical].»
Page 86 : « On ne dira jamais assez l'importance de la curiosité dans l'essor conquérant de l'Occident. Les musulmans [avant le 20e siècle] ne sont pas curieux. Adeptes de la vrai foi et convaincus de la supériorité de leur civilisation, ils se contentent de mépriser l'Occident, qu'ils tiennent pour irrémédiablement barbare : ils l'ignorent. »
Page 90-91 : Désastre intellectuel.
Page 98 : « Travaillées par l'avant-garde islamiste, les masses musulmanes, pauvres, incultes et abruties par la propagande d'une presse aux ordres, sont inflammables à volonté »
Page 106 : Europe, terrain de chasse.
Page 111 : « Les groupes se forment sur place, sur le campus, en prison ou dans la cité. » Coût d'une bombe, idéologie primitive et technologie de pointe.
Page 126 : Le multiculturalisme conduit au ghetto.
Page 130-131 : « Est-il trop tard pour redresser la barre ? » L'école [en France] est le champ de bataille décisif.
Page 137 : « Alors, entre les sociétés qui respectent la laïcité, c'est à dire la liberté, et celles qui ne comprennent même pas ce que cela veut dire, on a inventé le « dialogue des civilisations ». C'est un miroir aux alouettes. »
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![]() "Le zen en guerre
1868-1945"
Brian Victoria
Seuil
Paris 2002
Le bouddhisme jouit d'une enviable réputation : il serait ,par essence, pacifique. Est-ce vrai ? Probablement, si on se limite à la doctrine du Bouddha, dans sa forme originelle. C'est moins vrai quand on étudie les diverses incarnations de sa doctrine. Et cela ne l'est plus du tout quant on observe le bouddhisme zen japonais au début du 20e siècle. Car c'est bien de l'implication presque totale du bouddhisme japonais dans l'impérialisme nippon en Asie entre 1904 et 1945 dont Brian Victoria, lui-même bouddhiste, parle dans cet ouvrage.
par Bernard Antoine Rouffaer
Quelques éléments intéressants:
Brian Victoria, page 22 : « …une réflexion de vingt-cinq années sur la nature réelle et souhaitable des liens que le moine bouddhiste zen entretient avec la société et ses membres, avec l'Etat, avec la guerre, avec la politique et avec l'engagement social. … Les gens et les idées que je découvrais dans ce royaume souterrain du bouddhisme était le reflet inverse de ce qu'on pouvait voir à la surface. En bas, la guerre et la tuerie étaient présentées comme des manifestations de la compassion bouddhique. Le non-ego du zen devenait synonyme de soumission absolue et aveugle à la volonté et aux ordres de l'empereur, tandis que la religion se donnait pour fin de préserver l'Etat japonais et de punir les pays ou les individus qui osaient contester le droit de celui-ci à la glorification de soi-même. »
Page 36-37 : Rôle du département de l'Enseignement Religieux, kyôbushô (créé en 1872): les moines doivent êtres agréé par l'Etat japonais pour donner des conférences ou célébrer dans les temples.
Page 59 : Suzuki : « ...les intérêts de la religion et de l'Etat se complètent et se soutiennent mutuellement ... »
Page 67 : Réponse de Sôen à une interpellation pacifiste de Tolstoï : « C'est pourquoi l'acte de tuer et la guerre sont nécessaires en tant que moyen d'harmoniser ... »
Page 88 : Gudô : « Il y a trois sangsues qui sucent le sang du peuple : l'empereur, les riches et les grands propriétaires terriens... »
Page 95-96 : Exécution de Gudô et de 10 autres condamnés, en particulier pour manque de foi en la divinité de l'empereur du Japon.
Page 99 : Exclusion de Gudô par sa secte.
Page 110-111 : Nogi, général vainqueur des Russes pendant la guerre de 1904-1905, sanctifié.
Page 134-5 : Tsuzuki Mana et Daiun Gikô, qualifiés de « chiens » pour avoir refusé d'exécuter des ordres militaires criminels en Chine (1943).
Page 137 : Que ce serait-il passé, pendant la seconde guerre mondiale, si seulement quelqu’uns des 200 000 moines, vivant dans 70 000 temples du Japon, avaient élevés la voix contre la guerre ?
Enseignement du maître bouddhique Suzuki, vers 1904-5, pendant la guerre russo-japonaise :
« On associe en général le sabre au meurtre, et la plupart d'entre nous se demandent quel lien il peut avoir avec le zen, qui est une école du bouddhisme enseignant l'amour et la miséricorde. … Il en va tout autrement dans le cas de l'homme qui lève le sabre par obligation, car en vérité ce n'est pas lui qui tue mais le sabre lui-même. Il n'avait aucun désir de faire le mal à qui que ce soit, mais l'ennemi se présente et se transforme de lui-même en victime. … » pages 177-178
Ecrits du docteur Hitane Jôzan, universitaire et moine zen, au sujet des débuts de la guerre sino-japonaise, en 1931 :
« Du point de vue de l'issue idéale, il s'agit d'une guerre juste et morale, une guerre d'abnégation par laquelle nous sauvegarderons la Chine du péril communiste et de l'esclavage économique. … …j'ose dire qu'il n'est pas déraisonnable de parler de guerre sacrée intégrant la grande pratique du bodhisattva. » page 208
Sur les activités de la secte [église en fait] soto zen pendant la seconde guerre mondiale :
« Le clergé zen disposait bien entendu d'une méthode unique en son genre pour former les sujets de l'empereur : la pratique de zazen, employée non seulement pour l'entraînement des officiers et des soldats, mais encore pour celui des travailleurs -… - des usines des industries de guerre. » page 221
Page 227 : Opinion de Suzuki : le triste état du bouddhisme japonais provient du fait qu'il s'est développé au sein d'une société féodale et oppressive.
Page 234 : « Acte de repentir » de Otagi Myôgen, directeur administratif de la secte soto.
Page 250 : Hakugen, son ouvrage Bukkyôsha no sensô sekinin.
Page 253-4 : Hakuun : « Il faut se battre durement et tuer tout le monde... »
Page 287 : Opinion d'un maître zen et d'une organisation d'extrême-droite après 1945 : La guerre fut perdue, non parce qu'elle était mauvaises, mais à cause du « manque de patriotisme »...
Page 289 : Epilogue : « En tant que maître bouddhiste de la tradition soto du zen, ... » « ...un passage obscur et effroyable de l'histoire du bouddhisme, ... »
Page 290 : « ...autres avatars militaristes du bouddhisme japonais ... » Y a t-il eu des antécédents en Inde ou en Chine ?
Ne pas manquer les six points de convergences relevés en 1937 entre le zen sans ego et le Bushido (soit le code de conduite de l'ancienne élite militaire japonaise, qui généra tant de massacres) par Furukawa Taigo, pages 169 à 171.
L'étude des soubassements idéologiques et des moyens d'action du système totalitaire japonais a pris beaucoup de retard par rapport à celle consacrée aux totalitarismes européens. L'une des causes principales de ce retard est le caractère composite du pouvoir nippon durant la période des années trente et quarante : une monarchie multiséculaire, un appareil militaire hypertrophié, une religion nationale (le shinto), des églises bouddhiques ralliées à l'Etat, des sociétés secrètes d'extrême droite très actives, des conglomérats industriels patriotes, une administration civile très loyale. Tous ces éléments, qui dans d'autres sociétés peuvent se trouver en lutte les uns contre les autres, se neutraliser mutuellement et laisser respirer une société civile libérale se sont trouvés, au Japon, fondu dans un tout cohérent, ne trouvant une moral que dans l'Etat, impérialiste, énergique, raciste, avide, qui, sous la conduite des militaires de l'Armée et de la Marine s'est lancé dans une suite sanglante d'aventures militaires et coloniales qui mènera aux bombardements de Tokyo, à Nagasaki, au « chaudron » de Mandchourie et à une fin sans gloire.
BAR
TABLE DES MATIERES:
Des moines guerriers aux moines soldats
Préface à l' édition française de Jean-Pierre Berthon 9
Préface 21
Note du traducteur 27
I. La Restauration de Meiji (1868) et le bouddhisme
1. La tentative d'éradication du bouddhisme. 31
Les mesures officielles contre le bouddhisme, 32. -La réaction
des institutions bouddhiques, 35. -La résolution du conflit, 36.
2. Le bouddhisme dans l' effervescence sociale. 43
L'attitude des bouddhistes face à l'Occident, 44. -La stratégie
nationale des bouddhistes japonais, 47.
3. Uchiyama Gudô, moine contestataire. 81
Les prêtres bouddhistes contestataires et l'affaire du « crime de
lèse-majesté »,81. -La vie d'Uchiyama Gudô, 83.
4. Les institutions bouddhiques et le rejet de
l'engagement social 99
La réaction de l' école soto du zen, 99. -La réaction de l' école
rinzai du zen, 100. -La réaction de la secte shin, 101. -La réac-
tion des intellectuels bouddhistes, 102. -La réaction du pouvoir,
104.
Il. Le militarisme japonais et le bouddhisme
5. L'intégration du bouddhisme dans la machine
de guerre japonaise (1913-1930) 109
Au japon lui-même, 109. -Au sein de la « Sphère de copros-
périté de la Grande Asie de l'Est », 116.
6. Les bouddhistes qui ont résisté. 121
La résistance organisée: Shinkô bukkyô seinen dômei, 121. -
La résistance individuelle, 130.
7. L'émergence du bouddhisme de la voie impériale. 139
Le bouddhisme et le régime impérial, 139. -Le bouddhisme et
la guerre, 148.
8. L'apparition du zen de l'État impérial et du zen martial 159
Le zen et le génie guerrier, 160. -Le zen et l'armée impériale,
182. -Le lieutenant-colonel Sugimoto Gorô et le zen martial,
185. -Yamazaki Ekijû, le maître zen de Sugimoto, 192.
9. La participation des maîtres et universitaires zen à
l'effort de guerre 203
Les activités des sectes zen, 215.
III. L'après-guerre
10. Le regard des Japonais d'après-guerre sur le boud-
dhisme de la voie impériale, le zen de l'État impérial et
le zen martial. 225
L'attitude de D. T. Suzuki, 225. -Les déclarations des sectes
bouddhiques concernant leur comportement pendant la guerre,
232. -L'apport d'Ichikawa Hakugen et d'autres commenta-
teurs, 238.
11. Le zen d'entreprise dans le Japon d'après-guerre. 275
Les programmes de formation destinés aux entreprises, 275. -
Le zen et l'armée japonaise d'après-guerre, 281.
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![]() “La religion fasciste”
Emilio Gentile
Editions Perrin
Paris 2002
Dans l’Europe du XIXe siècle se posa aux élites politiques la question suivante: si le panthéon national et sa religion n’existe plus, si le progrès scientifique, l'étendue du processus de déchristianisation, l'affaiblissement du respect envers le Monarque, créent un vide, sur quel socle spirituel fonder le nouvel État national ? Cet ouvrage expose la réponse que donnèrent à cette épineuse question les homme d’État, les théoriciens et les philosophes italiens. Avant la première guerre mondiale, la question fut traitée sous la double autorité du roi et de son parlement, dominé par le libéralisme. Après elle, si la dynastie de Savoie avait survécu à la crise, c'est bien le fascisme qui s'efforça de remplir le vide spirituel des Italiens. La religion a-t-elle besoin d’un dieu pour exister? Probablement, mais les classes dirigeantes italiennes tentèrent de lui substituer un surhomme. Le résultat ne fut pas à la hauteur des espérances...
Quelques éléments intéressants:
Page 15: La sacralisation de la nation débute en Europe avec la Révolution française.
Page 21 : Mazzini, en 1869 : « La race italienne n’est pas encore guérie de cette faiblesse morale, et la marque que son histoire hypocrite et simulatrice lui a laissé sur le front n’est pas encore partie. »
Page 23 : Où les Républicains italiens, au XIXe siècle, envient l’action de l’église catholique et veulent, pour la science athée, une structure qui puisse éduquer l’Homme italien : « …l’homme pris au berceau et tenu serré dans son poing jusqu’à sa mort ;… »
Page 38 : Influence de la religion d’État du Japon au tout début du XXe siècle sur la formation d’une religion laïque pour la nation italienne : auto-adoration.
Page 40 : Avant la guerre de 14 ; désir d’une grande part de la jeunesse d’insuffler une foi nouvelle dans l’acte politique.
Page 41 : La guerre de 14-18 perçue comme « une apparition tragique du sacré. »
Pages 70-75 : Culte fasciste rendu au drapeau national.
Pages 79-85 : Glorification fasciste de la Grande Guerre.
Page 107 : Règlement des trois grande fêtes du fascisme et de sa liturgie.
Page 112 : « Les fasciste ont raison d’excommunier les hérétiques de la Patrie » Critica fascista du 15.7.1923
Page 119 : « Seule une religion peut nier et annuler l’attachement à la vie terrestre. » Salvatore Gatto, 1928. Rapprochement entre les martyrs chrétiens et les héros du premier fascisme.
Page 122 : « Recréer en nous un sentiment religieux de l’État » C. Pellizzi, 1931.
Pages 123-124 : « Le véritable paradis se trouve là où la volonté de Dieu est faite, qui se retrouve également dans la volonté de l’État » Enseignement scolaire, 1936.
Page 128 : Identification du parti fasciste à un ordre religieux militaire ou à une Église, laquelle sert aussi à pourchasser les dissidents.
Page 132 : Culte des morts, ceux tombés pour la Patrie.
Page 138 : Où l’État fasciste n’a pas de théologie, mais une morale. Attitude du fascisme envers l’église catholique : réalisme politique plutôt que fanatisme idéologique ; l’objectif étant d’associer le catholicisme au projet totalitaire.
Page 153 : Culte de la romanité.
Page 163 : Le mythe selon Carlo Costamagna, juriste fasciste : une « représentation subjective de la réalité capable de provoquer une affirmation de l’esprit entièrement indépendante de son contenu logique expérimental ».
Page 167 : « Les disciples dégénérés de Rousseau »
Page 171 : « nouvel art fasciste des célébrations séculières »
Page 175 : Où l’organisation fasciste embrasse « les fêtes populaires jusqu’aux manifestations sportives et aux expositions. »
Pages 176-8 : Fascisation des fêtes rurales traditionnelles. Pas de religion de la nature, mais vision d’une nature domptée.
Page 220 : Le communisme regardé comme la « bestia ritornante ». L'un des fondements de la théorie fasciste du pouvoir.
Pages 260-263 : « Le culte du chef »
Page 286 : Le mythe Mussolini ; le dictateur regardé comme un dieu protecteur. Croyance en la bonté mussolinienne.
Bernard Antoine Rouffaer 8.7.2014
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![]() "Pourquoi je ne suis pas musulman"
Ibn Warraq
![]() Editions L'Age d'Homme
Lausanne 1999
Voila une belle profession d'absence de foi religieuse. Courageuse et déterminée. Courageuse parce que cet homme, étant né dans l'islam, de parents musulmans, par son rejet public de la religion et du mode de vie de ses aïeux, sera déclaré apostat par ses anciens coreligionaires, et donc puni de mort selon les règles de la charia. Déterminé parce que, contrairement à tant d'autres natifs du Proche et du Moyen-Orient élevés pour être de plus ou moins bons musulmans, Ibn Warraq, révolté par nombre d'aspects de cette doctrine, a choisi, lui, la noble voie du combat. Il en indique ainsi la nécessité: "Malheureusement, dans les pays musulmans, il est en pratique impossible de laisser les théologiens seuls dans leur univers étriqué et bigot." (p.350)
Son livre se divise en 17 chapitres, et ses coups partent tout azimut. Il rappelle l'affaire Rushdié et ses conséquences, puis critique la solidité des sources de l'histoire de l'islam. Il attaque vigoureusement la valeur et la véracité du Coran, expose la nature totalitaire de l'islam et met en doute la compatibilité des principes de cette doctrine avec ceux de la démocratie moderne. Ibn Warraq rappel le vieil impérialisme musulman et ses ravages, puis il évoque le sort des populations non-musulmanes hier conquises par lui. Il aborde enfin le sujet de la condition féminine. L'auteur termine en fustigeant la mollesse et la complaisance envers l'islam de trop d'intellectuels occidentaux, individus qu'il n'est pas loin de regarder comme des "collaborateurs" en puissance...
Un ouvrage remarquable donc, vif et ardent.
Quelque parties du livre ont particulièrement retenu mon attention:
Le chapitre 5, consacré au Coran, est particulièrement utile et réussi. Ibn Warraq montre que le Coran ne comporte pas que la parole d'Allah, qu'il n'est certainement pas écrit dans un arabe parfait, qu'il a subit divers rajouts et amputations.
L'auteur s'en prend au monothéisme lui-même, montrant sa fréquente infériorité morale, de facto, par rapport au polythéisme. Ibn Warraq présente l'image que les musulmans se font du dieu Allah par l'intermédiaire du Coran (prédestination absolue, châtiments divins, toute-puissance divine accompagnée d'une faiblesse et d'une variabilité toute aussi... divine). L'auteur pointe la confusion et l'irréalisme de nombre de passages du Coran traitant de divers prophètes et autres personnages ou événements inspirés du Nouveau comme de l'ancien Testament.
Le chapitre 13 est dédié à un libre penseur arabe, Al-Ma'arri, qui vivait dans l'Irak du temps des califes, critiqua l'islam..et mourut dans son lit. (Comme quoi, le pire n'est pas certain...)
Le chapitre 14 parle d'un couple réputé mal assortit : les femmes et l'islam. Deux phrases serviront de résumé:
p.366 "Nous avons donc démontré que l'islam n'est favorable à la sexualité que du point de vue de l'homme."
p.367 "Les apologistes ont exagéré le rôle que les femmes du Prophète ont joué dans la propagation de la religion."
Pour finir, ne pas rater la partie de chapitre consacré à l'horreur du porc qui règne chez les musulmans, bigots ou pas. Ibn Warraq décortique les causes de cette prohibition et jette bas les (manifestement fausses) raisons que les docteurs de l'islam avancent pour la justifier.
Bernard Antoine Rouffaer 11.8.2014
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![]() "LETTRE A MAHOMET II"
Enea Silvio Piccolomini (Pape Pie II)
Traduction et préface Anne Duprat
Editions Payot et Rivages
Paris 2002
Un ouvrage essentiel qui devrait figurer dans les bibliothèques de tous les individus que l'existence du monde islamique et ses rapports avec l'Occident interroge. Le corps de l'ouvrage est constitué par la lettre rédigée par le Pape Pie II en 1462 à l'intention du sultan ottoman Mahomet (Méhémet) II. On sait que Mahomet II ordonna la conquête de Constantinople en 1453 et qu'il représentait une menace militaire et idéologique majeure pour l'Occident chrétien.
On comparera sur ce sujet les écrits du pape Pie II, éminent humaniste de la Renaissance, né dans une Italie voisine immémoriale du monde islamique, avec ceux de Jean-Paul II, né dans une Pologne trop proche de l'Allemagne et de la Russie soviétique, où l'islam ne représentait alors guère plus qu'un aimable tableau orientaliste... Une biographie sommaire des deux protagonistes, le Pape et le Sultan, est au bas de cette page. BAR
Où le Pape met le Sultan ottoman en garde contre
la capacité défensive des Occidentaux:
Page 24
« Voici à quoi nous voulons en venir. Toi et tes
ancêtres avez eu de nombreux conflits avec les
chrétiens. Beaucoup de sang a coulé, bien des
villes ont été détruites, des lieux saints incendiés,
des vierges enlevées, des femmes violées, des
champs dévastés. Tous les crimes imaginables ont
été commis dans cette lutte pour l'empire que le
Turc et le chrétien se disputaient, le glaive à la
main. Quant à toi, on le sait, tes actes mêmes l'ont
assez montré, tu ne désires rien tant que de sou-
mettre les chrétiens à ton joug, et de devenir ainsi
l'empereur des Latins. Et il se trouve sans doute
des gens pour te faire croire que ce serait facile, et
que tes armées n 'y rencontreraient point de résis-
tance. Certains exagèrent ta puissance militaire et
sous-estiment celle des chrétiens; d'autres fondent
leurs espoirs sur les divisions et sur les inimitiés qui
règnent entre nos peuples et nous affaiblissent,
arguant du fait qu'un envahisseur n'aurait pas de
difficulté à vaincre des gens en proie à des dissen-
sions internes. Mais nous ne pouvons croire que tu
ignores tout de nous, au point de méconnaître
la puissance de la chrétienté -la force de
l'Espagne, la vaillance de la France, la supériorité
numérique de la Germanie, le courage de la Bre-
tagne, l'audace de la Pologne, l'énergie de la
Hongrie, enfin la richesse, la fierté, et l'expérience
des armes que possède l'ltalie.»
Les Italiens du temps du pape Boniface sont d'une
autre trempe que les Romains du Bas-empire:
Page 27
« Les Italiens sont d'une autre nature; ils sont
autrement puissants, ingénieux et déterminés.
Accoutumés à commander, ils ne connaissent pas
la soumission. De plus, toute l'Italie est aujour-
d'hui sous les armes, elle abonde en hommes et
en chevaux, et ne manque pas d'argent, ce nerf de
la guerre. Si tu pénètres en Italie, en Hongrie ou
en quelque autre province d'Occident, ce ne sont
pas des femmes que tu auras à combattre. Ici, la
guerre se mène à l'épée, non à la pique de bois
comme en Asie. Les cuirasses qui couvrent les poi-
trines sont de bon fer de Chalybes; hommes et
bêtes combattent caparaçonnés, ils tiennent leurs
rangs dans la bataille et ne s'effraient pas d'un
rien. »
Rappel du danger que représentent les flottes
chrétiennes pour le monde islamique:
Page 37
« Tu connais la valeur des flottes occidentales, tu sais quelle ter-
reur se répand à Tyr, à Alexandrie et dans les
autres villes d'Orient, quand leurs trirèmes mettent
le cap sur elles. »
Pie II souligne la cruauté particulière des guerres
entre chrétiens et musulmans,
et appel à la conversion du sultan:
Pages 38-39
« Dans un conflit entre
chrétiens, ceux qui ont eu le dessous déposent les
armes et n 'y perdent ni la vie, ni la liberté, même
s'ils y laissent leur patrimoine. Les princes doivent
abandonner le pouvoir, leurs sujets changent de
maître, mais ils gardent le reste. Dans les guerres
contre les Turcs ou contre les Sarrasins, les vain-
cus, lorsqu'ils ne perdent pas la vie, sont réduits en
esclavage, et nombre d'entre eux sont contraints
d'abjurer leur religion. Ces guerres-là sont les plus
cruelles, les plus inhumaines de toutes. Si l' on y
met fin -et nous t'avons montré que cela dépend
de toi -une paix immense en sortira, un repos
pour tout l'univers. Car, comparées à celles-là,
toutes les autres guerres ressembleraient presque à
la paix et au repos; et même ces conflits mineurs
se feront plus rares, lorsque quelqu'un sera en état
de réprimer les actes d'injustice d'un simple signe
de tête. Tu pourrais être celui-là, nous le croyons
fermement, si tu mettais le comble à ta puissance
en devenant chrétien. »
Falsification de l'Ancien et du Nouveau Testament?
Pages 120-121-122 (Accusation courante de
l'apologétique islamique envers les textes saints
du christianisme.)
« XIX. Vous nous opposez tout d'abord la falsifi-
cation des textes sacrés. Celui qui a prétendu cela
aurait dû se charger d ' en apporter la preuve;
quant à nous, il nous suffisait de nier qu'une telle
chose ait jamais eu lieu. Mais avec toi, il nous plaît
d'en user autrement, et nous allons te montrer de
la façon plus évidente que c'est là une calomnie
du fondateur de ta Loi.
La Loi juive, telle que Moïse et les prophètes
l'ont enseignée, fut rédigée plusieurs siècles avant
la naissance de Mahomet. Elle fut promulguée en
divers lieux, traduite en d'autres langues -et non
par un seul interprète, mais par plusieurs; sur
l'ordre de Ptolémée Philadelphe, soixante-dix
Anciens traduisirent cette doctrine et parvinrent à
des formulations qui concordaient entre elles
De même, Aquila, Théodose et Symmaque et
d'autres encore traduisirent aussi l'Ancien Testa-
ment. La version grecque et la version latine de
l'Ancienne Loi virent le jour bien des siècles avant
que la tienne soit promulguée. Toutes les biblio-
thèques sont pleines de l'enseignement de Moïse
et des autres prophètes; que ce soit à Alexandrie,à
Rome, à Athènes, à Carthage, à Syracuse, à Tolède,
à Lyon, ou dans toutes les autres villes de quelque
importance, l'Ancien Testament, traduit en grec
ou en latin à partir de l'original hébreu, était déjà
conservé et lu publiquement. Quel juif aurait été
assez puissant pour réussir à falsifier une doctrine
conservée par tous les peuples du monde ?
Le Christ n'était pas encore né, quand l'édition
des Septante fut réalisée. En ce temps-là, il n'y
avait aucune raison de falsifier les textes de la Loi,
puisqu'elle ne pouvait donner lieu à aucune
controverse avec les chrétiens: ils n'existaient pas
encore. Quant aux non-Juifs, pourquoi aurait-on
modifié pour eux quoi que ce soit à une loi qu'ils
ne reconnaissaient pas ? et moins encore pour les
juifs eux-mêmes, qui l'acceptaient et la révéraient
telle quelle. S'il y a eu falsification, elle n'a pu se
produire que dans les textes qui ont été conservés
par les Hébreux, et non ceux qui ont été traduits
en latin et en grec, puis diffusés dans tous les pays
du monde; et ce n'est même pas le cas, puisque
les textes juifs concordent encore, à ce jour, avec
les versions grecque et latine de la Loi. Cor-
rompre un texte détenu par tant de gens aurait
été très difficile, pour ne pas dire impossible; tan-
dis qu'il était facile pour Mahomet de produire un
seul faux et de le transmettre comme authentique
à des gens qui lui faisaient confiance depuis le
début. C'est pourquoi, même si vous en possédez
aujourd'hui de nombreux exemplaires au contenu
identique, cela ne prouve pas pour autant qu'il
s'agisse de la vérité; dans la mesure où ils émanent
tous du même texte, qui était un faux, ils contien-
nent tous le même mensonge -tant il est vrai
qu'une source amère ne donne jamais naissance à
des ruisseaux d'eau douce. »
Par quels moyens Mahomet favorisa l'extension de sa religion?
p.118
« La secte des Sarrasins se développa donc grâce à
sa tolérance des vices; elle autorisa les hommes à
prendre autant d'épouses qu'ils le désiraient et à
les répudier dès qu'elles cessaient de leur plaire,à
avoir de nombreuses concubines, à se vautrer dans
la luxure sous toutes ses formes, à satisfaire tous les
appétits du ventre et du palais, à l'exception de la
boisson, et à se livrer à toutes les voluptés du
monde. En effet, même si ta religion prescrit
quelques périodes de jeûne, elles ne sont faites
que pour aiguiser le désir, puisque les Sarrasins
jeûnent seulement durant le jour et passent déjà
ensuite toute la nuit à banqueter et à boire. C'est
bien pour cela que l'usage du vin est interdit: dans
un pays chaud comme l'Arabie, il serait nuisible,
et l'on prend davantage de plaisir aux boissons
fraîches. Voilà donc l'unique invention de Maho-
met pour assurer la propagation de sa doctrine:
ne prescrire que ce qui pourrait être agréable à ses
auditeurs, et particulièrement à la populace, qui
sur ce point ressemble aux bêtes de somme -et
là-dessus, il ne fut pas trompé dans ses espérances. »
Page 119
« Mais alors, comme un paysan avisé entoure
d'un fossé et d'une clôture la vigne qu'il vient de
planter, pour empêcher les bêtes sauvages de la
détruire, ainsi Mahomet prit des mesures pour la
défense et la conservation de sa religion. Dans sa
sagacité, il se rendit compte qu'il existait deux
façons d ' ébranler et de confondre ses dogmes :
l'autorité des textes et le raisonnement, et ne man-
qua pas de chercher des remèdes pour se prému-
nir contre ces deux menaces. À l'autorité de la
Bible, il opposa l'argument que nous avons rap-
porté plus haut: l'Ancien et le Nouveau Testament
seraient des textes corrompus, dans lesquels il ne
subsisterait aucun élément de vérité qui ne fût
dans le Coran. A la force du raisonnement il
opposa celle des armes, en défendant à quiconque
de discuter sa doctrine ou d'en rechercher les fon-
dements rationnels; à celui qui tenterait de la
combattre, il faudrait l'imposer par la force du
glaive. Et voilà les fortifications dont le vieux
renard réussit à entourer la religion qu'il avait
inventée. »
Souffrances et fidélité des orientaux
chrétiens soumis aux principes de la charia:
Page 151
« Ce qui est étonnant, ce qui est admirable, ce
qu'il faut célébrer de toutes les façons, c'est de voir
les milliers de gens qui portent le beau nom de
chrétiens et qui vivent sous ton autorité supporter
de lourds tributs, se laisser priver de leurs enfants,
spolier de leurs épouses, écraser sous le poids de la
servitude et de mille vexations, sans pourtant
renoncer au christianisme. Car s'ils acceptaient ta
loi, ils n'auraient plus à subir de violences de per-
sonne, les autorités les traiteraient avec douceur,
ils acquerraient la liberté et pourraient aspirer aux
honneurs et aux richesses. Mais ils préfèrent por-
ter le joug de la servitude et vivre dans l'opprobre
et la misère plutôt que de renier le Christ. »
Pauvreté culturelle de l'Orient après la conquête islamique:
p.140
« Autrefois, il y avait une vaste et flo-
rissante école philosophique à Alexandrie; la Syrie
et l'Asie pouvaient s'enorgueillir de posséder bien
des savants remarquables, dont les noms sont par-
venus jusqu'à nous. Mais après l'expansion de la
religion mahométane, on ne compte plus que
quelques-uns de ces grands experts des mystères
de la nature, parce que ton prophète ne saurait
procurer la sagesse aux humbles -pas plus que ta
Loi, qui a pour seul fondement la volupté et pour
seule défense le glaive.
Au contraire, chez nous les arts libéraux sont flo-
rissants: la philosophie est enseignée en public, la
théologie étudiée dans les écoles, aucune forme de
savoir n'y est oubliée. La plupart des facultés de
lettres les plus brillantes se trouvent dans les villes
d'Italie, mais de l'autre côté des Alpes comme en
Espagne, en Gaule, en Germanie, ou en Grande-.
Bretagne on ne manque pas non plus de collèges
où d ' excellents professeurs apprennent la sagesse aux
humbles. Car les chrétiens se donnent une peine infi-
nie pour instruire les ignorants, afin qu'ils aient
accès à la divine vérité contenue dans notre religion,
qui n'a jamais menti. Le fondateur de ta Loi, en
revanche, profère des mensonges -et des men-
songes inconsidérés, stupides, sans prudence
comme sans saveur. Souvent, il se contredit lui-
même, comme on peut s'en apercevoir facilement si
l'on examine sa Loi avec attention. Elle contient un
nombre infini d'inepties, de contes de bonne
femme, et autres sottises puériles. »
Pas de salut hors de l’Évangile:
« Nous nous
devons aux savants comme aux ignorants. Nous
désirons le salut de tous, Grecs, Latins, Juifs et Sar-
rasins; à tous, nous ne voulons que du bien. Mais
les biens véritables, nous savons que nul ne peut
les obtenir s'il les cherche en dehors de l'Évangile,
et reste étranger au nom du Christ Notre-Sei-
gneur. Ne te bouche pas les oreilles, ne détourne
pas le regard parce que nous venons de nommer
le Christ! »
Appel du Pape à la conversion du Grand Turc:
Page 156
« Souviens-toi donc de nos
paroles, et suis le conseil que nous te donnons de
bonne foi: reçois le baptême et la purification du
Saint-Esprit; embrasse le sacro-saint Évangile et
remets-toi tout entier à lui. Ainsi tu assureras le
salut de ton âme, tu œuvreras au profit du peuple
turc, tu pourras réaliser tes espérances, ton nom
sera célébré dans les siècles à venir, tu feras l'admi-
ration de la Grèce, de l'Italie, et de toute l'Europe,
on chantera tes louanges en latin, en grec, en
hébreu, en arabe et dans toutes les langues bar-
bares, et aucune époque ne perdra le souvenir de
tes exploits. On t'appellera «père de la paix» et
« source de quiétude » , les Turcs reconnaîtront en
toi le sauveur de leur âme, et les chrétiens le
défenseur de leur vie. »
Les deux protagonistes:
Enea Silvio Piccolomini, pape sous le nom de Pie II:
Né en 1405 près de Sienne (Italie).
"Il fut au premier rang des humanistes de son temps"
Secrétaire du cardinal Capranica en 1432. Poète, romancier ("Euriale et Lucrèce"),
historien ("Mémoires sur le concile de Bâle", "Histoire de son temps", et divers ouvrages historiques), géographe, auteur des "Discours" et de lettres.
Reçut les ordres majeurs en 1445.
Diplomate à la cour de Rome, évêque de Triste (1448), puis évêque de Sienne (1450).
Cardinal en 1456.
Elu pape en 1458.
Tenta de former une coalition européenne contre l'expansionniste ottoman en 1459.
Réédita la chose en 1461, y réussit partiellement, mais mourut d'épuisement au moment d'embarquer, à Ancône, en 1464.
Il rédigea son épître à Mahomet II en 1462.
Mahomet II, surnommé el-Fatih, et Fatih el-Istanboul:
Naît en 1430; fils du sultan ottoman Amurat II.
Succède à son père une première fois en 1443, puis, définitivement, en 1451.
S'empare de Constantinople en 1453.
Battu devant Belgrade par le roi de Hongrie Jean Hunyade en 1456.
Conquière la Grèce centrale et la Serbie en 1459, l'empire de Trébizonde
(côtes nord de l'Asie Mineure) et de l'île grecque de Lesbos en 1462.
Conquière la Karamanie en 1464.
Conquière la ville de Négrepont (Grèce) en 1470.
Ses armées ravagent la Croatie, le sud de l'Autriche et la Hongrie de 1470 à 1474.
Elles menacent Venise en 1479, mais se font battre en Hongrie.
Nouvel échec devant l'île de Rhodes (Mer Egée) en 1480.
Mahomet II meurt en 1481.
Bernard Antoine Rouffaer 18.8.2014
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